15
Sep
2016

Lascaux : 76 ans que le toujours jeune Simon Coencas...

Imprimer

Montignac - Tourisme

(1 vote, moyenne 5.00 sur 5)

Avec trois autres camarades légèrement plus âgés, Simon a pénétré dans les entrailles de la Terre par un étroit goulet caché par des buissons sur la colline de Lascaux. En cette sombre année 1940, plutôt même cette longue et noire période, un fait divers anodin va changer l'histoire de ce coin du Périgord noir, sur la vallée de la Vézère qui en avait pourtant déjà vu beaucoup d'autres.

Ces quatre jeunes téméraires : Marcel Ravidat 18 ans, Jacques Marsal presque 15 ans, Georges Agniel 15 ans et Simon Coencas 13 ans, se sont glissés dans ce boyau avec un équipement des plus rudimentaire. L'inventeur le plus important est clairement Marcel Ravidat, c'est sur son initiative personnelle qu'a été menée l'exploration avec du matériel de fortune qu'il avait emporté.

Ces jeunes ont découvert les peintures, mais pas immédiatement, dans une grotte, ont regardé d'abord où l'on met les pieds. Surpris par la richesse et l'ampleur de leur découverte, ils en font part à Léon Laval, un jeune retraité, ancien instituteur. Instantanément, celui-­ci comprend le caractère exceptionnel de cette découverte, puis vint l’abbé Henri Breuil qui confirma, et tous les autres, et les autres encore, tous pour en finir par ces gigantesques travaux aux portes de la petite ville de Montignac.

Lascaux, en quelque sorte une bouteille à la mer, une cavité rocheuse contenant des messages que l'on ne sait pas encore décrypter, que nous ont légué des hommes si proches et si lointains. En tout, l'on recense à ce jour quelque mille six cents gravures et six cents peintures (on en découvre encore). Qui sont les auteurs ? Pourquoi ont­-ils gravé et peint cela et ici ? Bien des questions restent encore en suspend, même si les avis, les théories se bousculent. Cet art pariétal (sur les parois) ou rupestre (sur des rochers), les termes sont plus ou moins synonymes pour les
dictionnaires, nous est miraculeusement parvenu presque vingt mille ans plus tard.

Dimanche après-­midi, au Prieuré, nous avons été quelques-­uns à écouter M. Coencas qui se promenait avec sa petite fille et son fils. L'on a appris ce que vous savez déjà peut-­être, qu'il a failli connaître les camps de concentration. Quittant Montignac et de retour à Paris, Simon Coencas ne sera pas épargné par la guerre. En 1942, il est arrêté avec sa famille et détenu un moment à Drancy. S'il a été relâché, c'est qu'à ce moment-­là, il lui manquait un an pour pouvoir être déporté. Son fils signale qu' "à cette période, la population française (ou parisienne) avait manifesté une forte réprobation face à l'enfermement et la déportation des enfants, même si l'on ne connaissait pas à l'époque le devenir des déportés". Les parents de Simon n'ont pas échappé à cette ignominie. Il se souvient de l'un de ses camarades, juste un peu plus vieux que lui, qui avait réussi à s'échapper du train et qu'il a rencontré, par hasard, à Paris à la Libération.

Simon Coencas, aujourd'hui âgé de 89 ans (il a découvert Lascaux il y a 76 ans), a gardé son âme d'enfant et a toujours le sourire, de la vivacité d'esprit et de la joie de vivre, lui que la vie n'a pas épargné. Il a même un peu joué contre son camp, ce grand fumeur, ce qui lui a valu deux pontages cardiaques et un cancer. Face aux reproductions de Lascaux IV (à lire dans un autre article à venir), il avait encore ce regard émerveillé de l'enfance... Rester jeune dans sa tête, cela conserve. Il apprécie bien sûr toutes les marques de reconnaissance, ces honneurs officiels. Malgré qu'il doive placer le pouce sur sa trachéotomie pour parler, il est volubile. Dès qu'on lui pose des questions, il raconte, raconte, il faudrait presque l'arrêter... Longue vie à vous, monsieur Coencas.

Jean-Luc kokel

- Photo : Simon Coencas (au centre) aux côtés de Germinal Peiro, président du Conseil départemental de la Dordogne (à gauche)