5 destins, 5 personnalités, 5 plaques déposées… Un dévoilement de plaques a eu lieu le samedi 29 avril 2023 dans la cour de l’ancienne école de Saint Lazare, à Le Lardin (Dordogne). Des discours ont eu lieu en hommage au parcours exceptionnel de ces 5 anciens élèves, aujourd’hui disparus. Dans la cour de l’école qui accueille maintenant le Musée de l’Industrie, l’amicale de ce musée a souhaité mettre à l’honneur ces personnes qui ont marqué l’histoire du village de Saint-Lazare et l’école fermée depuis 1994.
Les discours ont permis de revenir sur le parcours de cinq personnalités : Céline Bardou, 1ère femme maire de Dordogne (en 1945) (se caler à 8’15) ; les enseignants Paul Grelière (se caler à 11′) et Robert Bouissou (se caler à 24’25) ; et les deux anciens Résistants : Roger Ranoux (se caler à 44’37) et Lucien Cournil (se caler à 58′).
Voici les extraits des discours prononcés ce jour-là en hommage aux 5 personnalités :
« Suite à l’ordonnance du 21 avril 1944 qui dispose que les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes, les premières élections auxquelles les femmes participent sont les municipales d’avril mai 1945. Le 20 mai 1945, madame Céline Bardou est désignée maire de la commune de Saint-Lazare. Elle est la seule et la première femme maire en Dordogne. Elle exerce cette fonction de 1945 à 1953. De 1953 à 1955, elle siège au conseil municipal comme adjointe au maire. Madame Bardou est née Marguerite Céline Laborderie le 13 octobre 1881 au bourg de Saint-Lazare. Elle s’est instruite à l’école de son village. Le 4 août 1893 à Terrasson, elle passe son examen de certificat d’études primaires qu’elle obtiendra à l’âge de 12 ans à peine. Le 22 octobre 1904 à Saint-Lazare, elle épouse Pierre Gabriel Bardou. De leur union naîtra en 1910 leur fils est Eloi Raymond. Ensuite, elle demeure avec sa famille, au Rieu un lieu-dit de la commune. En 1926, elle subit le deuil de son mari. Et c’est surtout trop tôt également qu’elle perdra leur unique fils enlevé en pleine jeunesse. Madame Bardou s’est éteinte en 1967 à l’âge de 86 ans. J’ai connu madame Bardou. J’en garde le souvenir d’une petite femme souriante, joviale, attachante ».
G. Bouyssou rend hommage à Paul Grelière : « Je ne peux pas dire que je l’ai connu mais je l’ai rencontré, ça fait bien longtemps, je n’étais pas bien grand, ici à Saint-Lazare, à la Mayade, et puis après à La Bachellerie puisqu’il y habitait. J’en ai entendu beaucoup parler par mon père notamment. Je présenterai ensuite Robert Bouyssou. Plus qu’une succession, je dirais chronologique, il y a entre les deux une filiation, je tiens à le dire. Pour le parcours de Paul Grelière, je me suis appuyé sur son dossier administratif, très bien tenu, très bien renseigné, et je dirais qu’il fait honneur à la fois à ceux qui l’ont rempli ce dossier, les inspecteurs, et puis il fait honneur bien sûr à celui qui en est l’objet. Et puis il existe un document très intéressant sur lui. Et je parle là sous le contrôle de Monsieur Rassat parce que c’est une interview de celui que j’appelle toujours le commandant Claval et le commandant de Claval raconte ses années d’école. Effectivement, il était au cours complémentaire à Terrasson avec Paul Grelière et vous pouvez consulter ce témoignage sur Ewanews, rubrique Portrait, Claval, c’est un document très intéressant.
En plus Paul Grelière si vous voulez vous pouvez l’entendre en direct parce que en 61 il était présent à l’inauguration du Foyer Laïque de Beauregard et il faisait partie des intervenants. Les discours ont été enregistrés et ils sont en ligne sur le site de la cinémathèque de Nouvelle-Aquitaine. Dans le rang des discours, il doit être dans les troisième ou quatrième. Le premier, c’est André Desmond. Ensuite, je crois que c’est Jean Rouby. Après il doit y avoir effectivement Paul Grelière.
Il est né en 1885 à Saint-Lazare, au sein d’une famille très modeste, voire très pauvre, comme beaucoup d’autres dans ce village. Il est scolarisé dans cette école, c’est un excellent élève, il obtient le certificat d’études et il intègre le cours complémentaire de Terrasson. Ce parcours là, c’est le parcours des bons élèves issus de familles pauvres. A la différence de l’enseignement secondaire de l’époque, le cours complémentaire est gratuit. C’est le collège du peuple. Certes ce n’est pas la voie royale comme le lycée qui mène vers le baccalauréat mais il est la principale possibilité de promotion sociale pour des élèves comme lui.
Pour l’anecdote, si on peut dire, mon père me le racontait et Claval le dit, il allait à pied au cours complémentaire à Terrasson, et quand il faisait beau, il enlevait ses sabots pour ne pas les user… Il obtient le brevet élémentaire en 1902 et il est admis sur concours à l’École normale d’instituteurs à Périgueux en 1903. A l’École normale, les admis bénéficient d’une bourse complète. Grâce au sacrifice de ses parents, grâce à ses talents, grâce à ses maîtres, il est sorti d’affaires et il est instituteur.
Après une année de service militaire, il est nommé instituteur à l’école primaire de Terrasson, c’était en 1906. 1er août 14 évidemment la mobilisation, il est incorporé au 126e Régiment d’infanterie de Brive. Dans les premiers mois de la guerre, il monte au front et il est blessé. Son dossier dit : »blessé par balle, plaie coupante à la cuisse gauche ».
Suite à cette blessure, il est classé en service auxiliaire et, pas réformé, il est démobilisé et il retrouve son poste d’instituteur à Terrasson. Il accomplit tout son parcours professionnel à Terrasson où il devient directeur du Cours Complémentaire. Il fait valoir ses droits à la retraite en 1941… Cette fidélité à l’école de Terrasson et à son cours complèmentaire, c’est l’attachement à un territoire, à des élèves, avec la volonté profonde de les faire progresser, grâce à un énorme travail opiniâtre et un dévouement sans borne.
Rigoureux, créatif, novateur, il intègre l’école dans son environnement. Si j’avais 30 secondes pour dire Paul Grelière, il a fait quoi ? Je vous dirais, Paul Grelière, il pose le socle de l’enseignement secondaire dans le terrassonnais. Pour moi, il ouvre des perspectives en termes d’éducation et de formation qui restent d’actualité.
Sous son impulsion, le cours complémentaire, en 6 ans, double ses effectifs. L’inspecteur l’écrit dans son rapport en 1925 : « c’est probablement le plus important cours complémentaire du département ». Pourquoi ? Il n’y a pas de secrets, ce sont les bons résultats des élèves qui obtiennent des succès au brevet élémentaire, au brevet supérieur, réussissent au concours de l’École normale, aux PTT. C’est le sésame pour l’emploi, et ça se dit.
Et puis aussi, il répond aux attentes de l’environnement et s’adapte au progrès technique. Les inspecteurs soulignent (en 1922): « il a instauré un cours commercial très apprécié de la population et des commerçants, ils préparent des employés à l’esprit ouvert. Tout récemment, une section industrielle et d’artisanat a été créée dont il sera l’animateur dévoué. Il organise aussi un enseignement pratique de l’horticulture et de l’arboriculture forestière. C’est un novateur pédagogique. L’inspecteur note : « il est à remarquer que Monsieur Grelière apprend la pratique de la machine à écrire à tous ces élèves ». Il a installé un appareil télégraphique sans fil qui correspond tous les soirs avec la Tour Eiffel. Autre succès, il est attentif à travailler avec son environnement institutionnel, avec la mairie, et il fait une collaboration avec la section commerciale de la mairie. Il y a une entente qui fait que les élèves du cours complémentaire y sont admis. Il assure aussi une heure et demie de sténographie par semaine, sténographie qu’il a apprise par lui-même, comme la dactylo d’ailleurs, pour favoriser l’employabilité. Dans le document donc du commandant Claval, il le rappelle aussi : « la sténo, la dactylo, cela a servi beaucoup, par exemple pour madame G., si cela vous dit quelque chose. Grelière a même été un précurseur visionnaire dans le domaine de l’enseignement professionnel. En 1934, il soumet à l’inspecteur d’académie de la Dordogne un rapport intitulé « association de l’enseignement professionnel et de l’enseignement général » au cours complémentaire de Terrasson… C’est magistral, il anticipe notamment la reconnaissance de la culture technique, l’intérêt de l’imbrication « enseignement général – enseignement technique », l’un soutenant l’autre et réciproquement, la notion de formation continue et continuée, la possibilité de passerelle entre enseignement général et technologique, le rôle de l’école en matière d’insertion professionnelle et sociale, la nécessité du développement de structures de formation de proximité, pour favoriser les jeunes au premier niveau de qualification. Je me pose la question : aurait-il fait un bon ministre ? Moi je le crois, je le dis. Dans la même veine en 1952, il écrit un ouvrage intitulé « Sous nos yeux le mythe Danté ». C’est un ouvrage puissant, visionnaire, autant que pratique. Paul Grelière a compris les évolutions et les bouleversements que vont connaître la paysannerie française. Il veut aider les hommes de la terre à s’inscrire dans ces évolutions et à les maîtriser.
Il écrit aussi d’autres ouvrages : une géographie de la Dordogne qui a connu plusieurs éditions, la Dordogne ancien Périgord édité à maintes reprises, etc. Il est facile de deviner, en étudiant son action et son intense activité, que Paul Grelière était animé par un idéal de progrès, de justice, d’humanité. Il souhaitait un monde meilleur. Il ne s’est pas contenté de l’attendre. Il a construit, jour après jour, modestement, dans la durée, là où il était, à Terrasson, là sur le territoire comme on dit maintenant, avec opiniâtreté, générosité et talent. Il devait tout à l’école, il a tout donné pour elle. Il a fait tout son possible avec dévouement et amour pour ses élèves. Leur réussite était certainement sa meilleure récompense. Son oeuvre et son exemple méritent d’être rappelés, et de rester à nos mémoires et d’inspirer nos actions.
Guy Bouyssou rend hommage à son père…
Pour Robert Bouyssou, « je ne suis pas le plus objectif et vous avez le droit de relativiser » prévient Guy Bouyssou avant de dresser un portrait de son père. Je vous le disais, il y a plus qu’une succession chronologique avec Grelière. Il y a déjà une similitude, l’origine sociale modeste. Robert Bouyssou lui disait : « moi, je suis issu d’une pauvre famille de paysans. De toutes façons, à Saint-Lazare, nous étions tous pauvres, mais nous n’étions pas malheureux parce que l’on s’entraidait ». Et je crois que cette phrase est importante pour comprendre le parcours de Robert Bouyssou. Elle constitue un fil rouge. Toute sa vie, dans ses divers épisodes, dans ses diverses activités, il a mis en avant l’entraide, la solidarité, la fraternité active et concrète. En plus de la similitude d’origine, il faut aussi constater la similitude du parcours. Pour les mêmes raisons que Grelière, il est allé au cours complémentaire de Terrasson où il a été admis au concours de l’École Normale. A cet égard, il racontait une petite anecdote. Il allait évidemment comme les autres au cours complémentaire à pied et n’avait pas le sous pour une quelconque demi-pension. A midi, il mangeait avec sa gamelle dans la classe et alors là, il disait : Grelière est passé me voir et il me disait Bouyssou, j’ai préparé quelques petits exercices, ça pourrait bien vous aider pour le concours. Robert Bouyssou a été reconnaissant à Paul Grelière toute sa vie, parce qu’il était persuadé que cela avait dû l’aider pour le concours… Il est nommé comme instituteur en 1935. Il fait instituteur pendant un an et part deux ans au service militaire. Il est nommé sur un autre poste mais cinq mois plus tard, il est rappelé. En mars 1939, il part au 126 de Brive, et la Seconde Guerre mondiale commence le 3 septembre 1939. Le 126 monte au front, à la bataille de France. Il est géographiquement sur l’Aisne, sur le canal de Crozat, et durant les combats, il est fait prisonnier le 17 juin 40… Un million 500 000 prisonniers, c’est l’un parmi tant d’autres. Dans un Stalag, un gros commando de travail, à Würzburg, il est désigné par ses camarades comme le représentant des prisonniers face au commandant du camp. Il ne pouvait pas accepter que la lutte pour la nourriture oppose les prisonniers entre eux. Il a incité les prisonniers à se donner les moyens de mieux supporter les misères quotidiennes et de préserver ainsi leur dignité d’hommes face à l’arbitaire de la captivité. Avec trois autres prisonniers, il développe une préparation au certificat d’études, au cours d’enseignement secondaire, et assure la création d’une bibliothèque, d’une troupe théâtrale et même d’une équipe sportive ! Il a d’ailleurs reçu un Prix de l’Académie française et une médaille de la Wymca de reconnaissance pour son activité bienfaisante et réconfortante exercée parmi ses compagnons durant toute sa captivité pendant la guerre. Mais les plus beaux témoignages, c’était ceux qu’il recevait après la captivité durant des années de la part de ses anciens camarades. J’en ai retrouvé quelques-uns de ces petits messages. Ils écrivaient pour Noël, pour une naissance dans la famille… Bonjour Robert. Merci pour tout ce que tu as fait pour nous. Robert Bouyssou dans son dernier message via le journal du Stalag en 98 à tous ces camarades, soit peu de temps avant sa mort, a écrit : « au cours de mes 8 ans et demi de soldat entre 20 et 30 ans, mon temps de prisonnier a été une épreuve rude, mais au combien enrichissante sur la vie des hommes. Mon dernier souhait est que nous n’ayons plus besoin des souffrances et des guerres pour découvrir aussi le dévouement, l’amitié et la solidarité. Son camp avait été libéré en 45 par les Américains. Il rentre dans ses foyers le 6 mai et cinq jours après, l’inspection académique le nomme instituteur à Lavilledieu. Il y a une grande similitude avec Paul Grelière. C’est la fidélité à un poste, à un village et à une population. Résidant à Beauregard, avec le maire André Desmond, il fonde le Foyer Laïque de Beauregard en 1947. Il y a un film a été tourné en 47 48 49 à Beauregard sur la fondation du Foyer Laïque. Ce film est disponible sur la cinémathèque de Nouvelle Aquitaine, rubrique Beauregard. Pour lui, le Foyer c’était l’entraide, la solidarité, la fraternité, la convivialité. A l’époque où! le progrès n’était pas encore arrivé dans les maisons, le Foyer avait acheté machine à laver, cireuse, aspirateur, et c’était à la disposition de la population gratuitement. A sa retraite, il devient conseiller municipal puis maire de 77 à 95… Il a été nommé depuis maire honoraire. Si cette cérémonie est un hommage à des personnes, elle l’est aussi à une école. Voici quelques lignes d’un discours qu’il avait prononcé à l’Amicale des anciens élèves de l’école de Saint-Lazare où il tentait de répondre à la question : pourquoi est-ce qu’on est si attaché que ça à l’école de Saint-Lazare ? « Pour les plus anciens, cette école, avec sa belle architecture, apparaissait dans une époque de pauvreté générale comme un château du peuple face à d’autres châteaux. Il disait c’est là bien sûr que j’ai appris à lire, à écrire, à compter, et bien plus encore, mais c’est là, surtout, que j’ai appris le prix et la valeur de l’effort, le respect des gens et même des choses, la fierté du travail accompli et bien fait, la camaraderie, l’amitié, la solidarité des personnes et des peuples, le désir d’aller vers des horizons plus clairs, plus justes et plus humains.
C’est à Saint-Lazare, dans cette modeste école de village, que ces belles idées, ces beaux espoirs sont nés et se sont épanouis dans mon esprit et dans mon cœur. Et il conclut : merci mon école, merci mes maîtres de tout cela ».
C’est ensuite Jacques Ranoux qui s’approche du micro pour évoquer le souvenir et la mémoire de Roger Ranoux. « Ce n’est pas tout à fait évident de parler de son père, il y a beaucoup à dire… Roger est né en 1921, le 26 octobre, à Lavilledieu tout près d’ici. Son papa, le grand-père Alexandre, s’était marié très jeune après la guerre qui avait duré pour lui 7 ans. Il avait rencontré pendant son service militaire à Lyon Marie Claudia Proton, une jeune femme qu’il a épousé. Et ils sont venus s’installer ici à Lavilledieu, puis après à La Galibe, chez les parents d’Alexandre, ils ont eu deux garçons. Paul et puis Roger un peu après, et la maman Marie Claudia est décédé très rapidement d’une maladie terrible à l’époque, qui pour notre père a été un traumatisme qu’il a porté toute sa vie. Quelques années plus tard, il a rencontré Louise Girodolle qui travaille dans un restaurant sur Terrasson. Il l’a épousé et cette maman adoptive a élevé ses enfants… Le grand-père Alexandre était un militant, membre du parti communiste, engagé depuis toute sa jeunesse dans cette période des années 30 avec la crise, la montée du nazisme en Allemagne, la montée aussi du Front populaire avec les grèves, aura été une période très difficile pour les gens les plus démunis, pour les plus pauvres, et il allait souvent dans les réunions publiques pour porter la contradiction. C’était un homme cultivé, un humaniste avec un esprit très vif et un esprit de contradiction très fort. C’était un homme de conviction et les enfants étaient à très bonne école avec lui. Alors, ils ont grandi dans cette vallée de la Vézère où ils sont devenus un petit peu braconniers, ils vivaient dans la nature. Puis la guerre est arrivée et très vite, ils sont partis dans la Résistance en Corrèze : le père Ranoux, mon père Hercule puisqu’il est devenu Hercule, et puis plus tard Guy qui est devenu Mickey et puis Paul qui est devenu Apollon. En février 43, les premiers temps ont été très très durs pour ces jeunes résistants très précairement armés en se déplaçant forcément très rapidement pour échapper aux milices de Vichy mais pour échapper aussi à l’armée allemande, il fallait se déplacer. L’hiver, c’étaient des moments terribles. Le froid, la faim, la menace sans cesse de la milice, c’est une période très difficile pour la Résistance. Les choses se sont organisées et Roger est monté très rapidement dans la hiérarchie. Il a été suivi par ses deux frères et en février 44 s’est monté le premier régiment FTP qui comptait 250 hommes en Dordogne. Il en a pris la responsabilité, suivi par Guy et Paul. Les choses sérieuses sont engagées contre l’ennemi avec des sabotages et des attaques incessantes contre la milice et contre l’armée allemande des sabotages. Notamment les 14 locomotives dans la gare de Périgueux pour éviter que les bombardements ne fassent trop de dégâts au niveau de la population, ils ont préféré anticiper avec la destruction des locomotives. L’usine Progil a aussi été sabotée. Et c’était en même temps un harcèlement sans cesse des troupes allemandes et de la collaboration de Vichy. Le père rappelait sans cesse que la Résistance n’aurait rien été sans l’appui de la population. La répression allemande était de plus en plus difficile à ce moment-là, il faut savoir que la tête d’Hercule a été mise à prix et il faut savoir que la durée de vie d’un chef d’un chef résistant c’était à peine quelques mois… A la libération, il a été rappelé par le parti communiste pour être secrétaire fédéral pendant pendant cinq ans. Il a été candidat aux législatives en 1956, il a été élu député de la Dordogne… Il témoignait dans les écoles à la fin de sa vie pour défendre ses valeurs de la Résistance et lutter aussi contre les révisionnistes, tous ceux qui voulaient écrire ou réécrire l’histoire à leur façon. Ce fut un homme d’engagement avec des liens très forts avec cette commune. Il venait souvent ici. Il avait beaucoup d’amis et notamment Lucien Cornil. Les retours d’école se faisaient par le chemin vieux pour rejoindre la Galibe. Voilà, c’était un chemin des écoliers qui durait un certain moment. Il y a un souvenir qu’il nous racontait : il était assez turbulent dans cette école et la jolie Maîtresse avait su le prendre en lui donnant des responsabilités au sein de l’école. Alors, il était tout à fait fier et reconnaissant. Elle avait trouvé le biais pour calmer ce jeune garçon fougueux ! »
C’est enfin Madame Audrerie qui referme les discours avec un hommage à Lucien Cournil.
« La vie de Lucien Cournil est bien inspirante. Né en 1926, il obtient ici à Saint-Lazare son certificat d’études en juin 1940 mais déjà la guerre bouleverse les existences et au vu de l’orientation politique familiale et dans ses circonstances, Lucien, patriote convaincu qui prône déjà la tolérance, va tout naturellement entrer dans la Résistance.
Il commence adolescent à distribuer des journaux résistants dans les boîtes aux lettres des Lardinois puis son implication dans la Résistance s’accroît. Et le 9 mars 1944, lors d’une échauffourée avec la milice, il est blessé par balles. Ce qui lui vaudra un séjour à Clairvivre, à l’hôpital. Quelques opérations plus tard, quand commence à renaître l’espoir, le voilà affairé avec détermination sur les chantiers de l’après-guerre à la reconstruction. Il ira dans les Ardennes, en Yougoslavie où il fêtera ses 20 ans. Il travaille dur mais toujours passionnément. Il devient ensuite journaliste mais il garde en lui son envie de partager sa lutte contre le régime vichiste. Alors à la retraite, il commence son inlassable travail de passeur de mémoire. Plus qu’un travail, une passion de transmission à la jeune génération pour qu’elle se souvienne de cette part de notre histoire. Toujours avec le sourire, il témoigne dans les collèges et les lycées pour transmettre le passé et que l’espoir et la générosité gagnent. Jusqu’à l’aube de sa vie, il a continué à enrichir par ses connaissances la nouvelle génération sur l’importance de la tolérance. Nous n’oublions pas Lucien notre Lulu. Voici notre hommage pour celui qui entre dans l’histoire comme un grand personnage qui savait conjuguer avec élégance la sagesse de l’esprit et la passion de la résistance. Merci. »