Badefols-d’Ans : commémoration 1944

Lundi 1er avril 2024, les habitants de Badefols-d'Ans ont célébré le souvenir des 80 ans de l’incendie du château et ont rendu hommage aux victimes de la Seconde Guerre mondiale.

Un souvenir des morts qui appelle donc à relire l’histoire terrifiante des millions d’innocents déportés à l’Est de l’Europe pour y disparaître dans des conditions tragiques.

Mars 1944, la division Brehmer a été constituée, pour réduire les forces du maquis de la région Centre ouest de la France et faire la chasse aux juifs. Le 1er avril 1944, l’opération de nettoyage sur la région s’est poursuivie jusqu’à Badefols-d’Ans. Alors même que le château de Rastignac (à La Bachellerie) et le village de Rouffignac ne sont plus que cendres, la division SS du général Brehmer désigne Badefols-d’Ans comme sa nouvelle victime.

À 10 heures, un grand nombre de soldats se présentent au château, fouillent de fond en comble. Que cherchent-ils, avec autant de soin, apparemment la chasse semble infructueuse. Le Comte Jehan de Lestrade de Conty et son épouse Diane sont accusés d’aide aux terroristes. Accusation grave, les De Lestrade de Conty ont sans aucun doute été dénoncés comme appartenant à la Résistance. Le comte Jehan appartient à l’organisation civile et militaire (OCM). Il y est entré par l’intermédiaire de l’Abbé Sigala, professeur de philosophie au collège Saint-Joseph de Périgueux et membre du réseau Combat. On frappe Jehan et Diane afin de leur extorquer des aveux.

En représailles, toute la famille est jetée à bord d’un camion. Seul le frère cadet, Adhémar, 17 ans alors au collège à Périgueux et qui devait arriver en vacances, échappera à la tragédie. Cette famille aura pour compagnon d’infortune une mère juive Jenny Kirchenbaum et son fils Daniel 9 ans pris dans le village.

Le château pillé, il ne sera retrouvé aucune trace de l’argenterie, des miniatures, bijoux anciens et bibelots, pendules, candélabres. Le linge disparaîtra également. Des villageois verront les Allemands charger deux voitures garées devant la grille. Des œuvres d’une grande valeur étaient cachés au grenier dans des malles. Comme à Rastignac et Badefols d’Ans, étrange similitude à deux jours d’intervalle. Pour effacer les traces de leur perquisition et comme pour brouiller les pistes, les Allemands incendient le Château. Parti à midi, le camion n’arrivera pourtant qu’à minuit à la prison de Périgueux. En effet, s’arrêtant tout au long du parcours, à chaque village, il chargera de nouveaux juifs tandis que seront brûlées leurs maisons. À Périgueux, le calvaire de la famille de Lestrade se poursuivit. Les femmes attendront six semaines avant d’être libérées.

Entre-temps, le Comte Jehan de Lestrade de Conty et son fils seront déportés à Buchenwald. Jéhant de Lestrade de Conty décédera à Buchenwald en octobre 1944. Déporté à Buchenwald puis à Bergen Belsen, son fils Louis sera libéré le 15 avril 1945, il sera rapatrié en France le 30 avril 1945 terriblement affaibli. L’année 1946 verra le début de la reconstruction du château familial qui appartient aujourd’hui à la société immobilière du château de Badefols d’Ans. Camille Coudry, a raconté que, depuis son jardin, il avait pu voir Daniel Kirchenbaum courir derrière le camion des Allemands pour y rejoindre sa mère Jenny qui venait d’être arrêté à son domicile de Chapeau, tous deux déportés à Auschwitz le 13 avril 1944, ils décéderont le 18 avril 1944. Nous sommes tous des passeurs d’histoire et de mémoire qui ont pour mission d’emporter avec nous sur l’autre rive l’âme de notre nation pour passer le relais aux jeunes générations. Gardons toujours à l’esprit que le renoncement aux valeurs de notre République Liberté, Egalité, Fraternité peut conduire au pire. Michel Pitout.

—>>> Captation vidéo complète de la cérémonie (montage ci-dessous d’Alain Rassat/ Ewanews), avec des témoignages d’habitants, et les discours de Sylvianne Granchamp, maire de Badefols-d’Ans, et de Jean-Paul Bedoin, président des anciens combattants de la résistance (ANACR Dordogne).

 
 

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